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La Philosophie d'Alan Watts
14 novembre 2014

GAP 01

En guise d'avant propos

 

« Là, Mon Cher Pierre, me suis-je dit, si tu tentes le coup d'un nouvel Intermède, tu vas perdre le peu de visiteurs que tu as. »

Pour simple information, je m'adresse à moi-même en tant que « Mon Cher » tout simplement parce-que j'ai fini par apprendre les vertus de l'amour de soi ; qu'il est difficile d'être en paix avec les autres sans l'être d'abord avec soi-même. Pour le dialogue, de « moi » et de « Mon Cher Pierre », le visiteur voudra bien me pardonner cette implicite prétention d'être une sorte de demi Sage, le parlement intérieur (A. David-Neel), ou les criailleries de la foule en moi (J-P Sartre), s'étant unifiés en moi.... je ne serais plus que deux... donc une moitié de Sagesse... où ne résiderait plus tel un redoutable questionnement du Sphinx, l'interrogation : Qui est le vrai Moi, de « Mon Cher Pierre » ou de cette part de moi qui en a conscience?

Il va de soi que c'est façon de parler. D'autres « personnages » et identifications fallacieuses subsistent encore en moi ; il est seulement vrai qu'au sein de mon parlement intérieur « Pierre » et la conscience de me prendre pour « Pierre » sont à l'image de deux principaux partis de mon « hémicycle intérieur ». Tant qu'à poursuivre l'analogie jusqu'au bout, il me faudrait avouer que je ne sais lequel de ces deux parts de Moi est au gouvernement de mon existence et lequel est dans l'opposition.

(Je rappelle qu'Alan Watts exigeait de ses étudiants, à l'Institut des Études Asiatiques, d'avoir parfaitement compris dans ses arcanes Les Enseignements secrets des bouddhistes tibétains, la vue pénétrante, 1951. Et, à mon avis, lorsque ceux-ci sont compris parfaitement, tout le bazar de l'ésotérisme de salon devient d'une simplicité telle qu'il ne nécessite pas un « bagage culturel » supérieur au niveau de celui qui permet de lire Tintin au Tibet avec plaisir. Par contre, il permet de jouer avec la vacuité sans avoir à s'inquiéter de ce qui part du moyeu central vers la jante ou de ce qui constitue le mouvement de nos existences mais trouve son essence dans le vide central de ses identités. Ce vide de l'identité centrale à quelque chose d'effrayant pour certains ; personnellement ce serait plus l'endroit où mène le roulement de la jante - tout aussi vide de « Moi-je » que son moyeu - qui me donne grand souci.)

Dans mon roman prétendu initiatique, sous des dehors hyper réalistes, j'utilise un truc : la narratrice est une journaliste. A ce titre, il est de son devoir professionnel d'informer, mais en allant au plus court. Une journaliste n'est pas supposé fournir de cours de philo, de psycho, d'art de vivre ou, que sais-je ? d’œnologie, tenez !

Dans ce blog, ici, par définition notes de brouillon, il me faut être un peu plus disert.

En troisième lieu, certaines choses peuvent se dire dans mon roman que je ne puis me permettre dans le cadre de mes billets.

En voici un exemple type : C'est lors d'une fugue dans une abbaye bénédictine que mon héros, prénommé Gérardin, va pour la première fois de son existence rencontrer l'idéogramme Tao   , qu'ensuite renvoyé de la pension d'où il avait fugué, il retourne à Paris , tout le temps d'une année scolaire, il va bénéficier d'un mentor de 43 ans, un chinois du Cambodge, lequel pour lui expliquer le fin mot du Bouddhisme chinois l’emmena voir le film Docteur Jerry et Mister Love (1963), après l'avoir invité à déjeuner à la cantine des étudiants cambodgien. Et, qu'ainsi, pour tout dire, j'ai découvert la gastronomie asiatique, une manière de vivre, l'Orient et les religions extrême-orientales deux ans avant qu'Alan Watts ne viennent y jeter un éclairage de dialogue inter-culturel que rien n'interdit de dire contre-culturel.

J'ai donc décidé de rédiger, ici, des notes d'une approche de loin de mon sujet, en traitant à la fois de mon roman, d'Alan Watts et de moi. Occasionnellement, en citant un « digest » de tel ou tel chapitre. Je suppose, spécimen type, qu'il peut intéresser mes visiteurs habituels d'apprendre comment & pourquoi la mort d'Alan Watts représenta pour moi une terrifiante tragédie et que ce n'est pas seulement le plaisir de le lire qui a fait un disciple de sa philosophie et de ses approches. Je le suis devenu pour sauver ma peau ! Voilà la chose dite, jamais encore avouée.

Tout en y venant, il peut être utilement distrayant.que je raconte la part autobiographique de mon roman et les paradoxes de mon héros, dans ses rapports au sujet de ce blog sur la Philosophie d'Alan Watts. D'un autre côté, à vérifier ici l'infrastructure philosophique des récits contenu dans le roman, je pourrai peut-être en améliorer la clarté et la solidité.

Je ne sais ce qu'en penseront les éditeurs et les lecteurs, mais, pour ma part, je pense avoir écrit un roman initiatique. D'une manière générale, on pourrait faire la même remarque pour tout autodidaxie en n'importe quel domaine. (Un Le Corbusier par exemple, qui n'a jamais obtenu un diplôme d'architecte en bonne et due forme !1 )

L'avantage du roman sur l'essai est l'inutilité de prétendre en rendre raison. On présente des faits, on met en scène des dialogues ou des discussions de groupe sans avoir à se préoccuper de vouloir imposer un point de vue plutôt qu'un autre, ni préjuger du sens du mot, du corps de phrase ou de la réaction de tel personnage qui fera « tilt » chez le lecteur. Comme le disait Julien Cracq dans son « En lisant, en écrivant », chaque lecteur ré écrit le roman selon son vouloir2.

Ce qui m'autorise à faire allusion à mon roman initiatique provient de ce qu'il est aussi tout à fait historique, que la narratrice est une journaliste d'investigation. Ce léger mélange des genres m'a permis d'achever l'auto-analyse de certains problèmes psychologiques qui demeuraient en suspens, oubliés ou carrément déniés dans un coin de ma mémoire.

J'espère aussi intéresser mes visiteurs, qu'en attendant d'entrer enfin dans le vif du sujet (sur Psy-Spi), je m'en approche de loin à la manière de la logique chinoise d'aborder un problème par son extérieur pour mieux le cerner. Un « par l'extérieur » de traitement, mais qui ne relève pas obligatoirement de la dualité sujet-objet. Ce pourtour d'encerclement du cœur du sujet peut être lui-même tout aussi « intérieur » pour l'expérience vécue.

1 J'ai d'ailleurs séjourné une petite semaine dans son Couvent de la Tourette, avant sa restauration. Et, effectivement, ça ressemble plus à une distribution d'espaces, de masses et de lumières qu'à une œuvre architecturale. A certains moments, j'avais l'impression d'être roi d'infini et à d'autres d'être ramené à ma dimension de petit homme. Ce contraste m'avait vivement marqué : comment peut-on quasi simultanément se sentir ouvert sur l'infini, ou ébloui par la beauté, et ramené à sa petit dimension comme en une prison ! J'avais supposé que cela provenait du Beaujolais, disponible librement au robinet du réfectoire. Je m'étais même senti comme pris en faute, lorsqu'une après-midi j'étais descendu au village prendre un ballon de rouge, juste pour comparer. Le Père Hôtelier m'ayant surpris. Du coup, je n'étais plus sorti de l'enceinte des bâtiments conventuels. Du coup, j'ai passé une partie de mon temps à discuter avec le bibliothécaire, dont je rapporte l'un des entretiens dans mon roman, car je lui avais posé LA question à Mille Francs, en lui demandant : « Dites, mon Père, excusez-moi, mais avec tout le respect que je vous dois, vous ne comptez tout de même pas que je lise tous ces livres avant de me faire une opinion sur la religion et les possibilités d’œcuménisme ? » La bibliothèque du couvent comporte au moins cent milles volumes, et - à l'époque en tout cas, était situé dans une sorte de vaste hangar. Rien qu'à regarder vers le haut d'une étagère, on en éprouvait du vertige !

Et, j'ai donc ajouté : « Si je ne pouvais en lire qu'un ou deux, lesquels me conseilleriez-vous ? »

Il me proposa de lui acheter, à bas prix deux ouvrages qu'il avait en plusieurs exemplaires : l'un d'un certain Ratzinger - La foi chrétienne hier et aujourd'hui, 1969, l'autre un ouvrage collectif axé sur la pensée de Paul Ricœur. Sinon qu'il oblige de se soumettre à la rigueur de l'exposé, celui de Ratzinger (Sa – future – Sainteté Benoit XVI) ne présente aucune difficulté. Celui s'appuyant sur la pensée de Paul Ricœur ne me rebuta pas quant au style. Mais, les articles étaient complexes et je n'ai surtout retenu que cette idée première, que les fondamentalistes de tous bords feraient bien d'étudier : les textes sacrés ne doivent pas toujours être pris au pied de la lettre ; ils requièrent impérativement une interprétation, une herméneutique. Croire que tel ou tel grand prophète parvint à Jérusalem en telle ou telle année ne saurait nuire à personne, mais croire que « les murs de Jérusalem » en furent ébranlés ne saurait signifier qu'il s'empara d'un marteau ou d'une barre à mine pour le démolir au même sens littéral où les allemands entreprirent littéralement de supprimer le mur de Berlin fin 1989. Entreprise dont ils ne seraient d'ailleurs pas parvenu à bout et aussi vite (un an pour le mur en centre ville, deux ans pour l'ensemble de ce mur dit « de la honte ») sans l'intervention de diverses machines très puissantes. Comme aucun prophète n'entreprit de démolir les murs eux-mêmes, que le texte n'est pas à prendre dans son sens littéral, que signifie « ébranler les murs de Jérusalem » ?

 

2 Information anecdotique : j'ai eu l'occasion de le rencontrer dans les couloirs du Lycée Claude Bernard, où il nous fit cette déclaration qui n'encourt pas le risque de devenir célèbre « Faites les imbéciles autant que vous voulez, mais je vous précise que le Censeur va passer par ici d'une minute à l'autre ». (Nous étions en train de chahuter dans un endroit interdit.) Il disait vrai : une trentaine de secondes ensuite, nous entendîmes le pas caractéristique du Censeur et il nous fallut bien prendre nos jambes à nos cous, le plus silencieusement possible, pour lui échapper. Là non plus l'anecdote, pour amusante qu'elle soit, n'a aucun rapport avec la philosophie d'Alan Watts. Pas plus, du reste, que la publicité réciproque que se firent François Mitterand et Julien Cracq à l'occasion de la parution de En lisant, en écrivant. (Une excellente photo de Paris-Match montre Mitterand en avion, lors de la campagne électorale pour sa première élection, lisant ostensiblement Julien Cracq, le titre parfaitement visible.)

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