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La Philosophie d'Alan Watts

22 avril 2012

Arc-en-Ciel 1/2

Arc-en-Ciel 1/2

Alan Watts a souvent dit d'une manière ou d'une autre que nous concevons habituellement toute limite comme séparation par "choix" culturel ; nous pourrions aussi bien juger que toute limite relie plus qu'elle ne sépare. La peau de notre corps limite sa différence d'avec l'air environnante mais nous y unit. La peau est poreuse et fragile. Sinon, nous pourrions sans dommage nous baigner dans du gas-oil comme dans de l'eau claire (s'il en reste!). Notre peau est la forme de notre corps dans l'air ambiant, ou dans l'eau, le feu, les végétaux eux-mêmes (allez donc vous plonger dans un bosquet de ronces!) ou le métal (d'une automobile classique, par exemple, quand on oublie de traverser dans les clous et qu'on se retrouve à l'hôpital!).

Nous avons une logique d'exclusion plutôt que d'inclusion.

 

Une anecdote au passage : je me souviens avoir lu le compte-rendu d'un missionnaire catholique, dans une petite tribu vivant aux confins du Bhoutan, de l'Inde et de la Birmanie (tout au nord-est de la carte de l'Inde, si vous voulez à peu près situer), expliquant l'impossibilité dans lequel il se trouvait d'expliquer à ses nouvelles ouailles le dogme de l'Immaculée Conception : ils ne disposaient d'aucun mot pour désigner la "virginité", ni aucun mot pour désigner la "maternité" (comme résultat de l'intervention d'un père identifiable)*. Si ma mémoire ne me trahit pas, ils conclurent des explications -pour eux bien alambiquées- du missionnaire que la Vierge Marie était une magicienne ayant une sorte de théâtre à l’intérieur de son ventre : on écarte les rideaux et -hop!- Marie & Joseph se retrouvent avec dans les bras un magnifique petit Jésus, dont Dieu leur a fait cadeau. Ma foi! Je dois dire que je trouve cette métaphore bien plus poétique que celle du bébé dans un chou-fleur ou par parthénogenèse....

*Nota : cette manière d'envisager la chose serait également courante dans de nombreuses tribus du Sud-Est chinois.

La variété des vocabulaires "locaux" peut aller beaucoup plus loin que le mot "neige" selon que l'on est esquimau ou amérindien, mentionnée dans The Book. Les expériences de vie, dont de "vie religieuse", ne sont pas toujours transmissibles, voire seulement traduisibles, d'une culture à l'autre. Et, c'est l'une de toute première idée du Livre que j'ai rapportée ici : Nous explorons les ombres de la vie avec le mince éclairage d'une lampe de poche, faisant succéder nos perceptions (et, au bout du compte nos aperceptions - notre savoir tout entier) de manière disparate et fractionnelle. Nous expérimentons une aperception de nous-mêmes comme nous expérimentons une perception des objets externes -et nous les expérimentons à la vas-comme-je-te-pousse de nos désirs comme à hue et à dia de nos émotions.

 

Je n'oserai l'affirmer, mais il me semble que le phénomène de l'arc-en-ciel est l'un des rares, voire le seul "objet" global que l'ego puisse percevoir en tant qu'ego séparé. Je suppose, sans l'affirmer, que c'est la raison qui explique le caractère quasi sacré, en tout cas symbolique ou religieux, attaché à l'arc-en-ciel.

 

Il devrait me permettre de sortir de l'impasse où mes réflexions me menaient. (Mon erreur ayant été de me fier au souvenir d'avoir "bien rigolé" en lisant Le Livre de la Sagesse en français. En réalité, je ne l'avais pas lu avec suffisamment d'attention. Et, par exemple, je ne m'étais pas aperçu que cet ouvrage est sans doute le seul et unique livre directement et explicitement libertaire et antipolitique qu'il ait rédigé. L'aide humanitaire, à plus forte raison "l'intervention" humanitaire, n'étaient pas encore d'usage courant : leur nocivité est directement mise en cause dans Le Livre. J'entends "sans faire appel à la différence Société Traditionnelle-Société Moderniste"1.)

Avec ces mots qui viennent fractionner le Réel2, qu'avons-nous déjà relevé ?

- que tenter d'entrer en "méditation", c'est tenter d'être là, tel que l'on est, sans esprit de devenir, sans arrière pensée d’Être autrement ; seulement d'être en présence de soi-même... quelque soit le contenu référé par ce "soi-même"3.

- le "double-bind" comme premier facteur actif de notre Ignorance du Soi cosmique4.

- que l'exemple type et quasi générique est «Sois sincèrement toi-même comme tout le monde!», qui est à double niveau //«sois sincèrement toi-même»// qui est en une double-injonction contraire : ce "Sois" signifie en fait "Agis" ou "comportes-toi" (ne serait-on pas en droit de ne rien manifester, de n'avoir aucun comportement repérable, de demeurer anonyme au milieu des autres ou "en repos" dans l'isolement.... comme en méditation et sans rien faire ?)

J'ai eu un oncle, pas très scientifique ni littéraire, qui disait "bouges-toi!", généralement associé à "tu veux du bœuf, je te ferai manger du cochon!"...

Nous ne sommes pas loin du //«comme tout le monde»// car la norme sociale vient indiquer ce qu'un bon "soi-même" (bon citoyen ou bon fidèle d'une religion) doit faire et ne pas faire...

"pour son bien"... la société civile et/ou religieuse ne peut vouloir que le bien de ses membres, n'est-ce pas ?

 

Bien entendu, lorsque Alan Watts nous dit que la religion consiste à éplucher les patates en pensant à Dieu (ou en "offrant" sa peine à Dieu) alors que le Chan/Zen consiste à se contenter de les éplucher dans l'instant de chaque pelure, il peut être bon de savoir que ce Dieu peut être l'argent, le pouvoir, l'érotisme, la réussite sociale, les honneurs, etc. aussi bien que le Père Éternel. Cette idée de Dieu, en tant que valeur suprême, est de l'ordre de ce "comme tout le monde".

- si la forme et le fond s'engendre mutuellement, il peut être utile de savoir que l'on ne peut être "soi" (la forme) qu'en fonction du fond (la société des "comme tout le monde") au niveau mental.

- les divers problèmes d'acculturation et d'inculturation, comme ceux du bourrage de crane, apparaissent alors. Il est bon de connaître ses propres racines, au niveau des contraintes directes policières ou psychiatriques, comme au niveau des "double-bind" beaucoup plus cachées et/ou inconscientes.

- servam annam, tout est nourriture, vaut à tous les niveaux, plans, aspects de ce "soi-même" comme de ce "comme tout le monde"5. Nourriture du corps, des émotions, des ratiocinations.

- nous envisageons "les choses" séparément mais néanmoins comme de même "substance"!

 

Mais, j'y reviendrai car j'ai insensiblement fait varier l'acception des notions utilisées.

Est-ce l'impasse ? Au moins, que je me sois perdu en cours de route ? Probable...

Le point soulevé au début étant la perception de deux formes et de deux fonds, chaque noir-blanc et chaque blanc-noir indiquant deux choses différente selon son coup d’œil : un vase ou deux visages nez à nez, pouvant donner lieu à des projections différentes : par exemple, l'amoureux qui "voit" des lèvres s'approchant pour un baiser et le prêtre qui y "voit" le calice du rituel & sacrement de son sacerdoce.

 

 

 

1-Dans mon essai sur Watts (et un essai n'est pas un traité), j'avais cité la célèbre phrase de Thoreau « De tout cœur, j'accepte la devise "Le gouvernement le meilleur est celui qui gouverne le moins" » parce-que tous les amis de Watts le pensaient et l'utilisaient pour la question raciale, la guerre du Vietnam comme dans le mouvement psychédélique. Toutefois, -à prendre avec réserve-, dans Le Livre, Watts se réfère nommément à Thoreau pour le première fois.

2Pour paraphraser Laozi (35), le Tao devient fade et sans saveur, on le regarde mais on ne le voit pas, on l'écoute mais on ne l'entend pas... nos cinq sens ne nous permettent plus de percevoir et d'avoir l’intuition directe de l'ensemble de ce panier sémantique contenant des mots tels que Réel, Soi cosmique, Dieu, etc. mais évitant (ici) d'en donner une quelconque quiddité.

3Pour simplifier, à l'usage des connaisseurs : pratyahara et dharana ne sont pas Dhyâna, ni Samadhi -étant toutefois entendu que les huit branches sont parties d'un même arbre qui pousse simultanément de toutes parts... en absence d'un obstacle ou d'un coup de vent venant casser telle ramification et obligeant à une nouvelle harmonie (et/ou homéostasie) de l'ensemble.

4J'évite, ici, "double-contrainte", car dans la "névrose expérimentale" deux stimuli de force égale et opposée peuvent entrainer une sorte de catalepsie. Cette perception est directe, réelle et "correcte" quant aux stimuli. Dans le "double-bind" la perception est "incorrecte", inconsciente... ou "subconsciente" à la rigueur!

5Je ne puis résister au jeu de mots : comme tout le monde, dans un "monde" dont 95% des gens "normaux" vivraient à New-York et -voyageant- dépasseraient la statue de la Liberté pour se retrouver aussitôt dans le port de Shanghai!

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16 avril 2012

Précision

La citation sur le "sentiment océanique" est bien sûr de Pierre Hadot.

Les paragraphes se sont inversés.

Bonne journée !

16 avril 2012

Le Livre de la Sagesse (4/5-E)


Avant d'en venir au 5/5 des méandres de ma réflexion....

Alan Watts nous dit lui-même :

Mon propre travail, bien qu'il puisse paraître parfois un système d'idées, est fondamentalement une tentative de décrire l'expérience mystique, non pas de visions officielles et d'êtres supra-naturels, mais de la réalité telle qu'on la voit, et qu'on la ressent directement dans le silence des mots et du mental. («My own work, though it may seem at times to be a system of ideas, is basically an attempt to describe mystical experience, not of formal visions and super-natural beings, but of reality as seen and felt directly in a silence of words and mindings.»In my own way, p5)

Mon commentaire de cette citation précise -et séparé de tout contexte autre que mon propos- serait celui-ci : "l'officiel" et "le surnaturel" relève de l'inculturation, de l'acculturation ou des Soucoupes Volantes, mais pas de cette spontanéité naturelle et réelle (autrement dit, pouvant être décelé par des électroencéphalogrammes, des analyseurs de sang et je ne sais trop quel autre moyen du "genre pour cosmonaute", mais qui attesterait, voire prouverait, que "du réel" a eu un "effet" sur "du réel".... en dehors des mots, de tout système de croyance ou de toute élucubration du mental).

Tout ça seulement pour dire que je souhaite parvenir le moment venu, très bientôt, à susciter un autre écho qu'une réaction du genre "tiens? intéressant!"

J'ai déjà eu l'occasion de le dire : que ce soit comme "vulgarisateur" du Chan/Zen ou d'un transcendance ésotérique de l'opposition Orient-Occident, Alan Watts est dépassé depuis longtemps.

Il demeure la question de savoir quel est l'impact des mots "vulgarisés", quelle expérience personnelle intérieure ("ésotérique") en découle, quelle transformation, etc. ... quelle Voie ouverte sur laquelle marcher et non plus gloser.

&

Je tiens par avance à me défendre de passer sans cesse du coq à l’âne dans cette suite de réflexions suscitées et élevées par ma (cette fois-ci) lente lecture du THE BOOK, LE Livre : n'y aurait-il aucun lien d'interdépendance mutuelle entre un coq et un âne ?

&

Alan Watts, en soulignant l'importance de la Contemplation chez Aristote, m'a évidemment fait penser à Aristote lui-même, qui m'a fait penser à Pierre Hadot. Lequel me fit un choc aussi considérable que si j'avais lu à la une d'un quotidien "Les professionnels de la philosophie descendent dans la rue pour réclamer du gouvernement un peu plus de Sagesse!". J'en étais sidéré. Cette année là, 1996, je lisais systématiquement peut-être m'y avait-on abonné– le Magazine littéraire. L'un de ses numéros porte sur le thème «Le souci, éthique de l'individualisme» (345 - juillet-août 1996), dont l'un des articles titrait explicitement Le souci de soi, venant fortement nuancer cet "individualisme". Ma collection de cette revue doit être dans l'un ou l'autre de mes cartons. Il y a suffisamment de pagaille chez moi pour que je me risque à en ouvrir au hasard. Mais, via le Web, j'ai pu consulter une interview effectuée peut avant sa mort parPhilosophie Magazine (Propos recueillis par Thierry Grillet) dans laquelle, il déclare :

«D'où le reproche d'incohérence ou de mauvaise composition que les interprètes modernes, obnubilés par l'aspect systématique d'une pensée, ont souvent fait à l'égard de ces philosophes antiques. Je me suis rendu compte que les auteurs composaient, non pas pour exposer un système, une théorie parfaitement cohérente, mais pour produire un effet sur le lecteur ou l'auditeur. Ils voulaient faire travailler l'esprit de l'auditeur ou du lecteur pour qu'il se mette dans une certaine disposition. D'où cette mobilisation de tous les moyens rhétoriques et imaginatifs pour convertir*. ...on voulait convertir les disciples à des modes de vie bien précis.»

 *Souvenons-nous que Pierre Hadot "pense grec" et qu'il entend donc "conversion" au sens de transformation de soi (metanoïa) et non pas, bien entendu, de "credo"...

 

N'est-ce pas proche de ce Watts nous dit de son "own work" ? Et, tacitement, ne suis-je pas une manière de "disciple" du philosophe californien ?

J'ajoute qu'il déclare aussi «Je m'étonnais d'être moi, d'être là dans ce monde immense et inconnu, dont j'étais une partie. Romain Rolland a appelé cela le «sentiment océanique». Ai-je été prédisposé à la philosophie par cette expérience?»

Je m'étais réconcilié avec cette notion "océanique" via celle de "retour" de la Chine ancienne. Mais, dans ma jeunesse, on m'avait tellement rabattu les oreilles des tendances "régressives" de ma personnalité que "océanique" m'était devenu ... tabou.

Au fond, vision "synoptique" pour l'intellect

vision "océanique" pour le sentiment

vision d'inclusion et d'appartenance pour le corps... Dao.

 

 

 

12 avril 2012

Le Livre de la Sagesse (4-5-C)

Le Livre de la Sagesse (4-5-C)

 

Pour débroussailler le terrain, qui en a bien besoin, je propose d'aller voir ailleurs que dans l’œuvre d'Alan Watts.

Car, je pourrais dire que (particulièrement au long du Chapitre 5) qu'Alan Watts a copié sur Liezi et son si fameux Yangzu :

 

...il faut leur laisser toute liberté d’écouter, de regarder, de flairer, de goûter ; toute licence pour les aises du corps et le repos de l’esprit. Toute restriction mise à quelqu’une de ces facultés, afflige la nature, est une tyran­nie. Être libre de toute contrainte, pouvoir satisfaire tous ses instincts, au jour le jour, jusqu’à la mort, voilà ce que j’appelle vivre.

=

Il arrivera certainement à vivre plus longtemps, dit Yang-tchou. Mais, vivre plus longtemps, est ce un résultat qui vaille qu’on se donne tant de mal, que l’on fasse tant d’efforts ? Le monde a toujours été, et sera toujours, plein de passions, de dangers, de maux, de vicissitudes. On y entend, on y voit tou­jours les mêmes choses ; les changements même n’y aboutissent à rien de nouveau. Au bout de cent ans d’existence, ceux qui ne sont pas morts de douleur, meurent d’ennui.

=

Le monde a toujours été, et sera toujours, plein de passions, de dangers, de maux, de vicissitudes. On y entend, on y voit tou­jours les mêmes choses ; les changements même n’y aboutissent à rien de nouveau. Au bout de cent ans d’existence, ceux qui ne sont pas morts de douleur, meurent d’ennui.

...

Les anciens ne donnaient pas un poil à l’État, et n’au­raient pas accepté qu’on se dévouât pour eux au nom de l’État. C’est dans ces temps là, alors que les particuliers ne faisaient rien pour l’État, et que l’État ne faisait rien pour les particuliers ; c’est dans ces temps là, que l’État se portait bien. (Liezi.7) (ici traduction Weiger)

= = =

Mais, comme le note Cassandre, dans son http://www.cafe-geo.net/article.php3?id_article=1936

on ne manquera pas de me dire que

Lie Zi (4e siècle avant notre ère) et son « complice » Yang Zi (quand on écrit ce Zi là, on veut dire Maître, titre réservé aux penseurs et aux philosophes, attitude qui décrit une civilisation aussi bien que le fait qu’ailleurs ce même mot soit obséquieusement attribué aux avocats et aux notaires) sont définis dans notre langue par sept attributs : déterminisme, fatalisme, naturisme, épicurisme, scepticisme, égoïsme, pessimisme.

Il va sans dire que je ne partage pas les ardeurs militantes de Cassandre, dont je n'ai d'ailleurs découvert le site que hier matin, alors que je cherchais une traduction très "académique" de Liezi!

mais -c'est un autre fait- je ne peux pas m'empêcher de penser qu'il aurait bien fait rigoler Alan par ces autres qualités de Yangzi:

Égotiste revendiqué, individualiste, hédoniste, trois nouvelles qualifications....

...on pourrait l’accuser d’athéisme ; comme, en outre, il refuse tout embrigadement, voilà que l’on n’a pas manqué quelquefois de lui attribuer un anarchisme vigoureux. Encore deux - ismes de plus.

ou encore cet autre paragraphe:

« L’attitude de Yang Zhu possède en outre un énorme avantage : elle a probablement épargné à ceux qui ont eu à la connaître de se débattre dans l’hypocrisie des sentiments. On voudrait même aller jusqu’à dire que l’on pourrait la qualifier, ce que quelques esprits mal informés affubleront du mot paradoxe, d’une parfaite selflessness.

Pour les hésitants : selflessness est un compliment immense et neutre. Il signifie, selon le Harrap’s, soit désintéressement, soit générosité. On est loin des qualificatifs du début. Certaines traductions sont, d’évidence, idéologiquement biaisées quand elles donnent comme résultat : abnégation (trad Google), dévouement, abnégation (Collins), altruisme (Larousse), ou bien pire : oubli de soi, priorité à autrui. Elles reflètent toutes, plus ou moins, l’idéologie poisseuse d’une « société du care  », cette société dite du « bien-être » dans laquelle de bonnes âmes (sic) veulent nous engluer.»

Je rappelle au passage que j'ai prétendu viser une réponse à la question : "Pourquoi ne sommes-nous pas naturellement heureux, dans une société, religieuse ou laïque, qui -et c'est bien naturel- ne veut rien d'autre qu'assurer le bonheur de chacun le temps de son existence?" Ou, après...

&

Découvrir la véritable nature du "Moi" et du tabou qui nous en voile le simple perception est en effet bon à savoir pour la santé et la paix de nos esprits mais aussi pour des raisons très pratiques en économie, politique et technologie. («This is important not only for sanity and peace of mind, but also for the most "practical" reasons of economics, politics, and technology.»)

&

Je renvois (publicité gratuite) à Le monde diplomatique, d'Avril 2012, au sujet de la réunion sur « le bonheur » organisée par le royaume du Bhoutan au siège des Nations unies, Olivier Zajec, dont je voudrais citer ces trois phrases : « En un mot, le PIB mesure tout, sauf ce qui fait que la vie vaut la peine d'être vécue. »  1968, Robert Kennedy

 

«Comme l'écrit la CMPEPS, l'exigence de passer d'une évaluation de l'activité marchande à une évaluation du bien-être se fait plus pressante. (...) Les politiques devraient avoir pour but non d'augmenter le PIB, mais d'accroître le bien-être au sein de la société . Objectif qui ne remet pas totalement en question le PIB comme indicateur, mais implique de le transcender. Ce qui pourrait avoir des conséquences radicales. L'une d'elles serait la contestation du « modèle » américain, qui corrèle croissance et progrès. S'imposerait aussi le réexamen des mesures macroéconomiques monolithiques du FMI, fondées sur l'unilatéralisme des indicateurs classiques. 

 

L'économie libérale demeure un artéfact religieux et, comme tel, hésite à se priver de ses faillibles augures. Tant pis si ces derniers, marché ou agences, ont régulièrement besoin de victimes pour pouvoir « lire » dans les entrailles de la croissance.»

 

10 avril 2012

Le Livre de la Sagesse (4/5-B)

Cup or faces paradox

=

 

Le fond et la forme s'engendrent mutuellement, tels le Yin-Yang.

 

Il importe de faire remarquer l'Ancienne Civilisation étant déjà entrée en décadence qu'il devint rapidement nécessaire "d'inventer" les notions de "jeune yin/vieux yin" et "jeune yang/vieux yang", afin de faire bien comprendre que cette relation est dynamique et que le Dao est, par définition, mouvement.

 

Nous poserons diverses questions idiotes :

 

- Pourquoi ne naissons-nous pas et ne restons-nous pas heureux tout le temps de notre existence ?

 

- Pourquoi les gouvernants s'acharnent-ils à faire le malheur de leurs peuples ?

 

Nota : ma formulation implique par elle-même un lien dont je tenterai d'éviter de tenir compte (du moins dans un premier temps). ma référence première est la fable du "chien et du loup", mais elle ne tient pas compte du phénomène de la domestication : un loup éduqué tel un chien ne peut pas survivre dans la nature.

 

Le but poursuivi sera plutôt une illustration de mon idée (mon "dada") de vouloir qualifier Alan Watts de taoïste, étant entendu que le Dao est un idéogramme chinois mais sa réalité universelle.

 

Afin de tisser les items, ils seront plusieurs fois utilisés sous des aspects, des niveaux ou des angles différents.  

 

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10 avril 2012

Le Livre de la Sagesse (4/5-A)

Le Livre de la Sagesse (4/5-A)

 

The Book est l'avant-dernier livre (rédigé) d'Alan Watts. Mis à part In my own way (et "Tao", inachevé, publié à titre posthume), il ne publiera plus rien. (Il avait interdit que ses enregistrements radio ou télé soit retranscrits de son vivant).

Alan Watts ne tardera d'ailleurs pas à prendre les dispositions nécessaires au sujet de la répartition de ses biens comme de ses droits d'auteur, entre ses femmes, enfants et petits-enfants.

Il sait déjà que "son temps est compté". Il fera bien un séjour en hôpital, mais, au bout du compte jugera que le jeu (de se soigner) n'en vaut pas la chandelle. Il reprendra ses habitudes (dont celle d'alcool) comme si de rien n'était et se mettra à beaucoup voyager en Europe et en Asie. Voyages éclairs le plus souvent, accompagnés de quelques amis qui demeurent très avares de souvenirs.

Détails "people" : chaque épouse reçoit les droits correspondants aux livres écrits au cours du temps de leur mariage - une femme prétendra indument avoir eu un enfant de lui, mais un détective privé se chargera d'établir l'infondé de ses allégations - à examiner cet "aspect du dossier", on peut découvrir que ses enfants et petits-enfants furent soigneusement tenus à l'écart des frasques de leur père ou grand-père - on dit même que l'une de ses filles ne savaient pas que son père était célèbre ! - toutes les décisions seront scrupuleusement respectées par la famille, puis prorogées.

 

&

 

Ce tabou, qui, en résumé, nous fait penser que nous sommes un ego, séparé à l'intérieur d'un corps lui-même séparé -et en conflit- avec son environnement physique, lui-même séparé d'avec le "divin" et/ou le fin mot de l'histoire de notre propre existence.

Je voudrais reposer la question à l'inverse de ce qu'elle parait être posée dans ce Livre :

Non plus envisager ce qui nous empêche mais ce qui nous CONTRAINT.

(Accessoirement, ça revient à se demander aussi, implicitement, si nous ne serions pas beaucoup plus "pré-déterminé" que "déterminé", que ce soit génétiquement ou linguistiquement. Puisque aussi bien, un musicien quoique "déterminé" par do-ré-mi-fa-sol-la-si-do et ses intervalles, etc. est LIBRE d'en faire ce qu'il veut. (De grandioses opéras ou, tel John Cage, monter sur scène nous jouer des silences, et en rester là!)

N'était-ce pas André Gide, sur un tout autre sujet, qui notait pour ainsi dire :

"il y faut, mais il y a beaucoup de comme il plaira"?

Watts utilisa largement les théories de la perception des formes, et je vais commencer par là.

L'une des "lois" de ces théories consiste à distinguer "la bonne forme", laquelle est souvent idéologique. Loi de perception, elle l'est aussi du phénomène de projection, d'une perception élective, d'un choix pourrait-on dire... si nous ne savions d'avance que ce "choix" est lui-même déterminé... ou "pré-déterminé"... ou métaphysique d'une certaine manière.

Le vase de Rubin, qui peut aussi bien représenter un calice que deux amoureux sur le point de s'embrasser, servira plusieurs fois pour rendre sensible que le "fond" et la "forme" s'engendrent mutuellement.

C'est ce que je me propose d'examiner au long des pages qui suivront, portant sur l'Inculturation et la Spontanéité. (Ou mettons, provisoirement, "religion" et "nature".)

 

&

 

Il n'est pas inutile, auparavant, de rapporter qu'Alan Watts, dans l'une des dernières pages du Livre, nous dit (quoique nous puissions penser par ailleurs de sa logique et de ses discours) que nous devons continuer de respecter Aristote en ce qu'il nous rappelle que la raison et le but de l'action, son objectif est toujours la contemplation - connaître et être plutôt que chercher et devenir. (the goal of action is always contemplation knowing and being rather than seeking and becoming).

L'homme moderne se demande surtout "que faire?" et "ça rapporte combien ?".

Chez l’égoïste (selon nos normes en vigueur), il est difficile de discerner laquelle des deux questions est première ; dans le cas de l'altruiste (selon nos normes), la seconde question se transforme en "ça coûtera combien ?).

Dans un cas comme dans l'autre, il n'est pas demandé si la dite action apportera un bonheur réel ou une aide quelconque en termes de joie de vivre. On va encore m'accuser de mesquinerie : je conserve le souvenir écoeuré des toutes ces femmes et enfants qui moururent de "l'aide" reçue.

 

 

18 janvier 2012

Le Livre de la Sagesse (3/5)

(Petite note de transition & d'entrée en 2012)

Qui visiterait ce blog en cours de route risquerait, m'a-t-on fait remarquer, de ne plus retrouver "son Watts" -s'il en a déjà lu quelques livres, ou bien de se faire une idée totalement fausse de son œuvre -s'il ne l'a découverte que très récemment. Watts n'a jamais utilisé l'expression d'Apophatique générale, a écrit sur bien d'autres sujets que le seul Taoïsme ou que le "Taoïsme chan". Enfin, m'a-t-on dit, un visiteur ingénu ou peu averti serait en droit de penser que je passe un peu trop facilement du coq à l’âne, abordant des questions que ne traita nullement Alan Watts ou sans rapport avec le contexte culturel californien (qui fut la "Côte d'Azur" du nouveau défroqué de l'Anglicanisme américain, l’Église épiscopalienne). J'avais en tête de faire le point sur ces points qu'au Printemps ou à l’Été prochains.

Mais, je puis tout de suite en dire, ou redire, voire prédire quelques mots :

- je suis heureux et comme flatté que ce blog soit en lien avec Wikipedia. Et, c'est un fait, à l'occasion de mes billets, je puis être amené à fournir des informations rigoureusement objectives et vérifiés sur la vie ou l’œuvre d'Alan Watts, mais étudier Watts, c'est s'étudier soi-même. Je traite donc de "moi-je" dans ses réflexions comme dans sa vie. Au lecteur/visiteur de faire la transposition en sa propre voie (du moins s'il ne considère pas la pensée d'Alan comme un simple objet de discussion de salon ou de dissertation philosophique). J'avais comme voulu que Watts soit rangé sur Wikipedia dans la page "Taoïsme" et son existence s'est terminée alors qu'il écrivait à nouveau sur l'approche de cette notion à la fois "typiquement chinoise" et universelle de Tao (dao) - c'est un fait.

Mais, tant qu'à le ranger, "art de vivre heureux" conviendrait, quoique j'ai moi-même écrit dans mon bouquin que partout où l'on voudrait le ranger, il dérangerait...

- on pourrait s'étonner de me voir condamner tout prosélytisme et faire l'apologie de la pensée (& "non-penser") d'Alan Watts, qui d'ailleurs un problème de double-bind, double contrainte qu'exerce la société occidentale par l'injonction faite dès l'enfance à ses membres, -abordée dans le Book lui-même : Sois sincèrement toi-même comme tout le monde !

Mais, l'être humain est un être de communication (pas exclusivement sociale et/ou politique, toutefois, mais aussi écologique et mystique) ; et puis "philosopher" est aussi un plaisir d'échange verbale, de dispute d'idées et d'opinions, l'Agora...

- j'avais pensé que "Le livre de la Sagesse" me permettrait de faire pivoter ma réflexion pour cette raison que l'ouvrage est un résumé et comme une mise au point avant de tourner la page. Lorsque j'avais lu cet ouvrage, je l'avais dévoré (et bien rigolé) plus que vraiment lu, encore moins étudié. Cette fois, ne disposant que du texte anglais, langue que je comprends mais lentement, j'ai été contraint et forcé de constater que cette "mise au point" s'adresse au public américain, pourvu d'une mentalité américaine différente de la mentalité européenne et, singulièrement, de l'esprit français1.

Je ne vais pas pouvoir éluder cette difficulté et trouée d'incompréhension menant à croire acquis l'idée nouvelle, en raison de la possibilité de la ramener à une idée connue.

Je ne vais pas escamoter l'affaire ; je ne suis pas sûr de parvenir à l'élucider. Où clairement situer la cible que constituerait un axe mentalités française et américaine et un autre entre un pôle chinois du Dao et un pôle du Logos. Avec bien sûr -comme sur toute boussole, les quatre "intermédiaires" de la foi et de la science, de l'idéologie ambiante et de la créativité personnelle ?

Ouh! Là, là !

 

1Je n'ai rien contre (ni pour) "l'esprit français" ; je ne le prends pour cible emblematique qu'en ce qu'il fut un temps, voire plusieurs temps, où la langue française était la seconde, voire la première langue des beaux esprits, de l'Atlantique à l'Oural, pour reprendre une célébre formule du Général de Gaulle, et où nos philosophes conseillaient les puissants de ce monde. Ce "monde" étant l'Europe -et point final de la "civilisation"!

17 décembre 2011

Le Livre de la Sagesse (2/5)

A lire ou relire ce livre un peu particulier d'Alan Watts, on pourra constater qu'il n'y est nulle part question de Diogène, ni son alter-ego embourgeoisé que fut Socrate ; mais je me réserve le droit d'y revenir pourtant, en raison de ce détail qui a toute la vraisemblance d'être un fait historique : l'Empereur obtempérera à la demande du philosophe de s'écarter et de le laisser se réchauffer aux rayons du Soleil. De même que l'un des privilèges des grands lettrés chinois, à certaines époques, était le droit de remontrance à l'Empereur. Droit, qui, à certaines autres époques, pouvait devenir un redoutable devoir se concluant d'une décapitation. C'est un point intéressant. A ma connaissance, pour la période contemporaine, en France, je vois guère que le Général de Gaulle énonçant, au sujet de J-P Sartre : "On n'arrête pas un philosophe". Cette assertion, de nos jours, tomberait à plat : aucune voix ne se fait entendre qui ne soit courtisane. J'en ai bien peur. Mais, je ne demande qu'à être détrompé...

Et, d'autre part, -on finira par croire que j'ai quelque chose contre les traducteurs, ce qui n'est pas le cas ; c'est une façon facile comme une autre d'exprimer mon point de vue- qu'il n'est pas question de Sagesse non plus. Alors que des titres tels que "L’Identité Suprême", "Face à Dieu" et "Être Dieu" rendent parfaitement la différence de leurs deux contenus.

Au reste, tant qu'à rapporter ici ce qui me passe par la tête en ouvrant cet ouvrage, pourquoi ne rappellerais-je pas ce que j'ai dit précédemment sur l'identification que produisaient sur moi la lecture attentive des aventures de d'Artagnan et le talent d'Alexandre Dumas. J'en oubliais mon corps, comme mes mains tenant le roman et la texture assez rugueuse des couvertures de la Bibliothèque Verte, lesquelles ne deviendront lisses que quelques années plus tard. L'intérêt de cette remarque étant que sur le moment (lorsque je lisais) je chevauchais au grand galop ou tirais l'épée avec l'adresse fameuse de ce mousquetaire, mais que mon corps, en ses terminaisons tactiles se souvient d'une différence de "toucher" entre les premiers volumes de la collection de la Bibliothèque Verte. Sur ces points, à propos desquels je donne des impressions avant toute allusion au texte lui-même, j'ai grand envie -qui peut être injustifiée en raison- de préciser que Le Livre fait partie des trois ouvrages qui inspirèrent mon article sur "lire Alan Watts" et sa présentation de la Sagesse de la même manière qu'il est possible de lire Alexandre Dumas et son évocation du célèbre bretteur, postulant de devenir mousquetaire du Roi Louis XIII à l'instar de ses trois compagnons d'armes1.

Chronologiquement :

La Signification du Bonheur, comparant psychologie moderne et anciennes sagesses orientales, envisageant le Bonheur comme l'Acceptation en soi d'un microcosme dont le macrocosme serait Dieu lui-même, quelle que soit la conception dogmatique que l'on en a.

Le Livre de la Sagesse, analysant les divers facteurs qui nous interdisent d'accéder à la véritable Connaissance de "Cela" que nous sommes.

Le Tao (the watercourse way), la voie sur laquelle pour pourrions laisser nos pas se (faire) porter.

qui résument les étapes comme la substance de la philosophie d'Alan Watts.

De par leur éloquence, leur caractère de résumé, ou peut-être la force de conviction (en réalité, je ne sais vraiment pas pourquoi), ces trois ouvrages résument bien l'ensemble de l’œuvre et séduisent...fascinent et identifient au sens où d'Artagnan peut séduire un enfant.

Mais, une fois le livre refermé, on retourne aux mêmes questions qu'auparavant :

Pourquoi ne suis-je pas heureux ?

Pourquoi ne sais-je pas qui je suis ?

Pourquoi ne suis-je en marche (ou "coulant") avec, sur, dans La Voie ?

 

Cet aspect de séduction, plus que de démonstration et -encore moins- de réalisation en soi-même de la chose dite, a souvent été reproché à Watts2. Pour sa part, il disait lui-même tenter de faire appel à l'intuition & la sensation de ses lecteurs. Donner à éprouver plus qu'à prouver...

 

&

(Chap. 1)

Les moins de vingt ans de nos jours d'aujourd'hui sont parfaitement au courant de ce qu'il y a à savoir au sujet d'une relation sexuelle. Il n'est plus besoin de leur faire un dessin comme cela se faisait jadis en diverses contrées extra-européennes. (Il n'y avait pas que des dessins. Il y avait aussi des mimes et des danses. Là, ex abrupto, il ne me vient à l'esprit que le barata-natyam (qui avant que le colonialisme et puritanisme britannique ne passe par là s'effectuait nu) ou les danses de touaregs fêtant un mariage : avant de le consommer, les jeunes mariés sont conviés à danser et mimer très explicitement (quoique habillés) -devant les jeunes gens et jeunes filles pré pubères- ce qu'ils vont faire ensuite dans le privé. On peut retrouver de telles "danses & mimes" dans de nombreuses tribus africaines. Pour le XX° siècle, il faut bien sûr mentionner le rock'n'roll et toutes ses variantes, ainsi bien sûr que les danses de tango ou dérivées, la salsa, etc.

Ces danses sont généralement rigoureusement codifiées pour garder leur caractère d'initiation et écarter tout risque de dérapage vers l'orgie collective.

Mais laissons cet aspect d'un interdit, qui, néanmoins, pouvait avoir ses révélations pédagogiques ou initiatiques... sur le caractère sacré de la sexualité.)

 

Ce n'était pas le sujet du Livre...

... qui serait plutôt une tentative de traduire en langage admissible pour l'homme actuel une conception de la vie "bonne" et de la "bonne vie" des traditions anciennes, qui lui soit authentiquement une vision nouvelle du monde et de la place qu'il y occupe. Une vision et une expérience de soi-même au monde, et non pas de nouvelles idées, doctrines ou vagues croyances inutilisables dans le concret de chaque jour.

Une intuition qui puisse dépasser le divin jeu de cache-cache qu'est l'existence d'un "je".

Le Livre qu'Alan voudrait glisser sous l'oreiller de ses enfants n'aurait aucun but moral, ni projet, ni obligation, ni culpabilité de ne pouvoir les réaliser, mais révèlerait le dessous des cartes et/ou le manque d'information de première main permettant d'ouvrir son esprit à la possibilité que l'ego, le "je", serait tel un œuf dont l'oiseau serait le Soi libéré. Libre de la coquille d'un ego qui emprisonne, de la cloison du deux, du dehors et du dedans, du dessus et du dessous, de blanc et du noir, de la forme et du fond, etc. dans l'Unité3 tout entière : le Soi identique de soi-même et du monde (naturel et universel).

 

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La majeure partie du chapitre 2 (portant sur le jeu du noir-et-blanc) utilise un jargon qui m'est assez étranger ; je dois avouer mon incapacité d'en reprendre le fil conducteur.

L'expérience de la méditation permet cependant d'en comprendre intuitivement la signification : une chose n'est différente d'une autre qu'en ce qu'elles sont inséparables.

Quand on entre en méditation, on tente "d'être" simplement là, tel que l'on "est". Au vrai, on tente qu'il n'y ait plus que la sensation de vivre et on découvre tout un tas d'éléments disparates qui vont et viennent dans tous les sens. On se demande pourquoi. On y voudrait une cause, afin de la supprimer ou à défaut de la contrôler. On ignore que "entrer" en méditation revient à "entrer" dans une zone de sa vie où il n'existe plus de différences, en ce que celles-ci sont vues dans leur inséparabilité, leur insécabilité, leur relation intrinsèque ou encore, osons le terme : leur unité. Unité qui peut faire peur et donner l'impression d'un néant puisqu'il n'y a plus de conscience de soi, ni d'aucun objet de conscience. C'est le total "lâcher prise" dont traitent certains manuels. Il n'y a même plus sensation de bonheur ou de paix. Il n'y a plus personne pour constater cette dite "sensation" qui l'on suppose de paix, de bonheur, de complétude, d'éternité.

Pour ma part, la seule chose que j'ai pu constater, à posteriori, est de me sentir en pleine forme et, -bof!-, comme un peu plus "optimiste" que juste avant... que ce "juste avant" ait eu lieu (selon l'horloge) une, deux ou trois minutes... ou plusieurs heures auparavant ! (Nota : c'est à ça qu'il est fait allusion quand -du Zhuangzi- on mentionne l'expérience du cuisinier Ting.) Il s'agit de deux mondes étrangers l'un à l'autre. Quand le philosophe en parle, il renvoit aux limites du langage comme moyen de saisir la réalité des choses. En réalité, ce sont les six sens (les cinq sens "physiques" + le "mental" & le langage comme toute représentation4 et toute perception du fonctionnement de celui-ci) tronquent la perception et l'aperception du Réel aussi bien qu'ils en indiquent les objets multiples.

Dans ce chapitre, Alan traite plutôt de diverses choses qui nous empêche de vivre en méditation permanente, dans la contemplation permanente du Sage.

Alan Watts nous y fait même retomber en plein problème de langage, en affirmant que l'Attention est une perception rétrécie. Je suis prêt à parier que tous ceux qui lisent ont une idée positive de l'attention, comme valeur par elle-même autant qu'au titre d'instrument ascétique. (Certains livres sur Vipassana n'ont que ce mot au bout de leurs plumes : Attention !)

Mais, Alan Watts dans cet ouvrage est supposé s'adresser à des enfants ou à de tous jeunes petits d'Homme, qui n'ont pas encore pratiquer l'amour avec le Monde - qui n'ont pas fait l'amour avec le Monde ! Ou, si on veut, qui croit encore que ce que l'on appelle "faire l'amour" consiste dans l'intromission d'un pénis dans un vagin, une bouche ou un anus. Des trucs dans ce gout là. Et point barre !

Ce qui revient à explorer la vie comme une pièce sombre à l'aide d'une lampe de poche au faisceau très étroit, en une succession de réalités parcellaires s'ajoutant les unes aux autres dans leur disparité plus que leur association indissoluble, qu'il s'agisse d'objets, d'événements, de causes, d'effets et autres facteurs pouvant être qualifiés d'éléments de la réalité ou d'objets composant "le monde".

La manière dont on prête attention aux choses diffère d'une culture à l'autre. Et la capacité de remarquer les nuances et les variations d'une même chose diffère d'une culture à l'autre, d'un individu à l'autre. Comme exemple, Watts mentionne la variété des mots qu'utilisent les eskimos pour désigner la neige, alors que les amérindiens n'ont qu'un seul mot pour désigner ce qui tombe du ciel et qui est froid, qu'il s'agisse de pluie, grêle ou neige. Watts donne quelques explications sur cette façon sélective (tel le faisceau d'une lampe électrique) de regarder et de nommer la variété des objets de notre perception (& conscience du monde). Ce qui revient à exprimer la difficulté de nos consciences à vivre selon les rythmes du Monde...

...enfin, par voie de conséquence directe à nous faire une image contrefaite du "je", du "dieu", du monde et de leurs intimes relations.

 

Autrement dit, nous laisser bluffer par le jeu des apparences.

 

 

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1Au début de leurs aventures communes, d'Artagnan n'est pas lui-même mousquetaire.

2Faisant trop souvent oublier les réels apports novateurs, quoique "traditionnels", d'Alan Watts en théologie, en psychologie ou dans l'approche du Chan/Zen dont la mode actuelle semble (sociologiquement parlant) convaincre surtout les hommes (en raison d'une apparence "martiale" ?), bien qu'il soit -en fait plein de tendresse, emprunt même d'une sorte de douceur "fleur bleu" que dissimulent ou font oublier les "coups de gueule ou ...de bâton" des Maîtres.

3Ou "Conscience Cosmique".

4"nama-rupa

8 novembre 2011

Le Livre de la Sagesse (1/5) intro

 

On se fait toujours une idée des choses. L'idée que je me suis fait que ces choses qu'on appelle philosophie et sagesse, ou l'homme et la sagesse en sa philosophie remonte à loin : à Diogène de Sinoppe (-413-327) en son "tonneau", que je découvris dans un Illustré. Je ne me souviens plus si ce fut dans le magazine Tintin ou dans le magazine Spirou, mais je garde une image très nette d'un homme vautré dans une grande jarre et demandant à l'Empereur de s'écarter du soleil.

Il se trouve que certaines bonnes âmes faisaient à Alan Watts le reproche de corrompre les jeunes de Frisco pour les mêmes raisons que l'on eut l'occasion d'accuser Diogène de corrompre la jeunesse d'Athènes : son franc-parler, sa mise débraillé, la dissolution de ses mœurs, son excentrisme provocateur, sa rhétorique trop aiguë pour les oreilles habituées aux expressions bien-pensantes.

On peut se demander dans quel sens vient l'une de l'autre de l'autre : est-ce en raison de cette image, ou de cette idée, -"nama-rupa"- que j'ai été immédiatement séduit par celles d'Alan Watts ? Ou bien, ne parvenant pas à trouver en Occident un philosophe antique ou classique auquel je puisse honorablement associer Watts, juste pour le situer, comme ça, sans plus ? Je parle ici du Watts de la seconde période et non ce digne professeur que Kerouac montre en smoking dans ses fameux "Clochards du Dharma" (devenus "célestes" en traduction française) - digne mais conversant avec un couple de nudistes. Ce qui est déjà moins habituel pour un universitaire.

Le point que je veux relever est l'image "contestatrice" d'un philosophe antique jugeant les rayons du soleil de plus grand prix que celui des faveurs d'un Empereur (Alexandre le grand) venu le consulter. (On retrouve une idée similaire dans le Zhuang-zi -sinon que dans ce dernier ce ne sont que des envoyés de l'Empereur).

C'était un homme qui conformait ses dires à ses pensées, et faisait ce qu'il disait. Et, nombre de ses critiques de la Cité d'Athènes peuvent s'appliquer au Monde Moderne, à l'état d'esprit dominant dans le monde du XXI° siècle dit "moderne"1 : la compétition sociale, l'appétit des honneurs mais non le respect du sens de l'Honneur2, l'aliénation citadine de l'esprit de nature comme de spontanéité, etc. Je ne parle de tout cela qu'en cette question ci : comment placer les unes par rapport aux autres ces idées de sagesse (& philosophie), de pression sociale (& aliénation), d'illusion (& maya, nama-rupa), et ce qui en serait le contraire ou le dépassement : une idée de paradis.

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Le paradis comme retour au monde adamique, au jardin d’Éden, ou comme bonheur terrestre ou élan vers l'à venir d'un monde meilleur peut être inscrit ou orné du sceau de la sagesse.

Watts y observait que "vivre c'est sentir le parfum des fleurs, écouter la mer, regarder les arbres frissonner dans le vent, escalader les montagnes, manger du pâté, boire du vin, caresser une jolie femme, cultiver son jardin, se servir de ses mains, méditer dans le silence, marcher lentement, éprouver le sens fondamental de l'existence dans l'émerveillement, surprendre tous les sons, sentir les nuages et les étoiles me caresser les yeux." J'y reviendrai pour replacer ces expressions dans leur contexte.

Mais, je viens d'un petit tour de surf sur Wiki, qui souligne l'idée étymologiquement marquée d'accroissement, s'accroître, octroie qui fait que, etc. et que l'on peut construire : que le fait de s'accroître provoque en lui-même l'accumulation des satisfactions, ce qui le mène au bonheur.

Certaines citations ou présentations m'ont ennuyé.

 

Deux m'ont sauté aux yeux et rejoint le cœur :

 

- « Ou bien, pour m'expliquer sur ce sujet d'une façon plus simple encore, il y a un degré d'insomnie, de rumination, de sens historique qui nuit à l'être vivant et finit par l'anéantir, qu'il s'agisse d'un homme, d'un peuple ou d'une civilisation. » (Nietzsche, Considérations inactuelles, II, 1874) Mais, l'ensemble de la citation faite laisserait penser qu'il s'agit d'un texte de présentation philosophique du Chan/Zen. Quelque chose comme une manière de dire clairement les choses tout en prenant garde de ne effaroucher le lecteur.

- Celle d’Épicure : Le bonheur est le "plaisir en repos" de l'âme (sérénité) qui naît spontanément de la satisfaction des désirs naturels et nécessaires, dont les deux plus importants sont, outre la sécurité et la santé, la sagesse et l'amitié. Mais, nous dit-il, "Il est impossible d'être heureux sans être sage"...

Entre stoïcisme, hédonisme (& ebodonisme bouddhique, pour reprendre l'expression de SC Kohn3), épicurisme et Diogène ou Watts, il y a beaucoup plus de convergences que de différences.

 

 

1Quoique pouvant me ranger moi-même socio-économiquement dans la catégorie des pauvres, tout est relatif : je ne souffre pas de la faim contrairement à nombre d'autres êtres humains et Alan Watts, quoique généreux, était riche.

2Quand on lit que Diogène se promena en plein jour avec une lanterne "cherchant un homme ayant gardé sa superbe", on peut remplacer "superbe" par "honneur"...

3On peut noter au passage sa définition "réceptive" et "active" de la contemplation zen comme Bonheur-Liberté.

 

12 octobre 2011

Propos sur Alan Watts

(Nombre de propos de cet article demanderaient des nuances, mais il en est une que l'on peut faire par avance : pour savourer l'actualité de plusieurs textes en divers domaines il suffit de remplacer des lieux et dates : Three Miles Island, Tchernobyl, Fukushima... Pétrolier en Alaska, en Bretagne, en Nouvelle Zélande...Guerre du Vietnam, d'Irak, d'Afghanistan... Colonialisme et Post-colonialisme... Bien d'autres "sujets" pourraient être mentionnés, mais écrivant en français, je ne puis les mentionner sans risque de paraître prendre une "position politique". Or, Watts était autant "a-politique" qu'a-moraliste, qu'a-théologique, qu'an-historique, qu'anti-psychiatrique, etc. Nota : ces "a" "an" ou "anti" ne doivent pas être entendus comme "contre", mais comme de simples privatifs, en dehors et/ou en amont de tout esprit "partiel et partisan", que ce soit en "pour" ou en "contre".)

 

Le chapeau de l’évêque

(Propos sur Alan Watts1)

 

 

 

L’apologie du christianisme passe, comme chacun sait, par un dé­nigrement des autres religions. J’eus ainsi, du temps de mon catéchisme, l’occasion d’assister à une projection de diaposi­tives sur les religions non-chrétiennes, parmi lesquelles le boud­dhisme tibétain, jugé particulièrement primitif et abrutissant par mes éducateurs. je me souviens fort bien du petit incident que pro­voqua l’un de mes camarades en s’écriant, hilare : “Eh! Ils ont le même chapeau que l’évêque!” Remarque qui, on s’en doute, lui valut une très sévère réprimande. Pour ma part, je fus choqué : pour la première fois de ma vie, je prenais un prêtre en flagrant délit de mensonge. J’avais beau m’y essayer, je ne parvenais pas à voir autre chose : le dit chapeau des dignitaires tibétains et celui de nos évêques, cardinaux et papes se ressemblent étrangement.

 

Je n’ai cependant pas l’intention, en racontant cette anecdote, de reprendre à mon compte la rumeur propagée par les hippies améri­cains, selon laquelle le christianisme aurait vu le jour au Tibet. Je voudrais au contraire que bien des amateurs de spiritualité orien­tale ne fissent point ce type de rapprochements trop faciles. On peut du reste imaginer un jeune Tibétain se faisant tancer pour s’être exclamé à la vue d’une bar­rette de curé ou d’une mitre d'évêque : “Oh! Ils ont la même coiffe que le Grand Précieux!”

 

Alan Watts voyait dans ce refus des ressemblances et ce besoin de se démarquer de l’isomorphisme premier de toutes les religions la preuve d’une incompréhension, le signe d’une inaptitude à saisir les différences par contre bien réelles séparant la tradition du monde moderne. Il prêchait un œcuménisme total sur le fond des mes­sages, sans perdre une occasion de dénoncer les dégénérescences de leurs formes d’expression sociale et d’appliquer à l’Orient contemporain les mêmes poids et mesures qu'à l'Occident. Il observait par exemple qu’un monastère zen japonais n’est rien d’autre qu’un collège de jésuites, discipline et gros bâton. Il ne songeait pas qu’une forme puisse être préférable à une autre, pas plus qu’il ne jugeait souhaitable de prô­ner un hypothétique retour à une culture de type traditionnel. Tous les beaux sentimentalismes de retour au sacré ou à la nature avaient en effet à ses yeux un caractère fallacieux, en ceci qu’ils étaient eux-mêmes progressistes et fondés sur l’espérance d’un avenir meil­leur.

 

 

 

Pour Watts, les religions organisées, pesantes institutions dotées de structures mobilières et immobilières, liées à la grande concur­rence des prosélytismes et des fanatismes, sont totalement dé­passées. En cette fin de Kali-yuga, elles ne peuvent qu’accentuer la difficulté de se libérer intérieurement. Qu’elles soient, en effet, d’Orient ou d’Occident, les institutions se livrent entre elles à une compétition sans merci : de même que les individus, elles désirent se faire une place au soleil.

Les critiques, parfois très vives, formulées par Watts à l’égard de la vie américaine et des religions établies ne furent jamais un ap­pel à la révolution ou à un engagement partisan, mais une illus­tra­tion de principes métaphysiques plus que jamais d’actualité. L’étude de ces vérités évite de se laisser leurrer par les justifica­tions que s’inventent nos sociétés modernistes dans leur lutte contre la tradition.

A titre exemple, Henry Kissinger, dans son essai de 1974 sur la politique étrangère américaine juge que la situation désastreuse des pays en voie de développement provient avant tout de l’absence chez eux d’une révolution newtonienne : ces peuples “ont conservé l’idée essentiellement pré-newtonienne que le monde réel est presque complètement intérieur à l’observateur.” Autre exemple, récent (août 1985) : un homme politique français assez en vue re­vient du Liban où il a rencontré diverses personnalités, parmi les­quelles un évêque maronite qu’il estime “d’une très haute culture”, doué d’une “grande intelligence” et d’une “spiritualité élevée”. Il le juge cependant inadapté à la situation libanaise. Au journaliste de la radio qui manifeste son étonnement, notre voyageur répond, as­sez embarrassé : “J’oserais presque dire que ce chrétien éminent est trop musulman...Vous voyez ce que je veux dire...Il pense que l’histoire en a vu d’autres et que c’est la volonté de Dieu.2

 

Alan Watts se serait délecté des déclarations de Kissinger ou de celles de ce député. Faut-il être musulman pour accepter la volonté de Dieu (ou le “cours du tao) ? Cette acceptation peut-elle consti­tuer une entrave à la vie d’un peuple ? Qu’il s’agisse d’une menta­lité pré ou post-newtonienne, Watts partage la conception orien­tale d’un monde réel “presque complètement intérieur à l’observateur”. Comme se le demandait Gregory Bateson : “Y a-t-il quelque penseur transcendant la chose pensée ?” Il est certes lé­gitime qu’un homme politique lutte dans le but d’assurer la supré­matie de son pays ou de son État ; de tous temps des armées se sont levées pour marcher contre d’autres armées, et la loi du plus fort n’a cessé de prévaloir, encore qu’un roseau sache plier sans se casser. Cela dit, avant notre humanisme et notre allégation d’une supériorité du blanc christianisé, ayant pour mission d’apporter la civilisation, le progrès et le développement économique, les chefs de guerre savaient respecter le vaincu dans son identité. Ils pro­clamaient en substance “je suis le plus fort”, là où nos actuels di­rigeants disent à l’autre “tu as tort”. En fait, notre richesse maté­rielle et notre mode de vie humaniste ne nous ont pas apporté le bonheur promis. De quel droit pensons-nous qu’ils seraient suscep­tibles de l’apporter aux autres ?

 

 

 

Nous ignorons le bonheur et le cherchons au dehors, ailleurs ou plus tard. Un poème zen pose pourtant l’inévitable question :

 

“Si vous ne le trouvez pas en vous

Où irez-vous donc le chercher ?”

 

S’adressant à des psychiatres réunis en congrès, Watts déclara : “Je voudrais vous faire remarquer que tant que n’aurez pas fondé substantiellement vos assertions métaphysiques, vous serez bien obligés de reconnaître que vous ne disposez d’aucun moyen pour sa­voir dans quel sens s’oriente votre univers ; aussi, en attendant, devriez-vous vous abstenir de conclure trop facilement quelles sont les orientations qui sont progressives et quelles sont celles qui sont régressives.3

 

S’il se livre donc à une critique radicale du monde occidental, Watts ne se fait pas la moindre illusion : il ne rêve pas de changer le cours de l’histoire et récuse par avance tous les faux espoirs : il est vain de prétendre transformer le monde et la vie ou d’attendre du dehors des aides solides et durables au déve­loppement personnel. Lorsque Timothy Leary, chercheur scienti­fique apôtre du LSD, passe de l’expérience individuelle au prosély­tisme et à l’action politique en se présentant au poste de Gouverneur de la Californie, Watts le met en garde : “Tu es en train de te mettre dans une situation impossible. Si tu ne crées pas de remous, tu perds ton temps. Dans le cas contraire, tu finiras au pénitencier ou, ce qui est pire, au Capitole.4” Indifférent à “cette mégalomanie messianique qui naît d’une mauvaise interpré­tation de l’expérience de l’union à Dieu5”, il se sépare de nombre de tenants de la contre-culture américaine comme des autres ten­dances baptisées “Nouvel Age”, ‘Ère du Verseau”, etc...

 

On peut assez aisément s’entraîner à détendre ses muscles, voire, dans des exercices de méditation, à détendre ses pensées en les laissant aller et venir à leur gré. Mais comment s’abandonner à l’art de la cuisine ou vêtement, ou encore de la réflexion philoso­phique ? Comment lire détendu un document juridique alors que je viens de recevoir un rappel d’impôt ?

 

Comment s’y abandonner en évitant que l’esprit, sans prendre la moindre distance, ne s’emporte et ne se mette à fulminer contre les industries agro-ali­mentaires, celles de la confection, ou le sadisme foncier des col­lecteurs d’impôts ? La recherche spirituelle peut-elle devenir autre chose qu’un credo idéologique forgé à partir d’un certain nombre d’idées reçues ?

 

 

 

 

Dans ces divers domaines, Watts préconise un changement d’état d’esprit plus qu’une modification des condi­tions extérieures et des rapports sociaux ou économiques. Étudier ces conditions revient à rassembler des indices sur notre es­prit. Des indices, et non des “réalités”, celles-ci étant de l’ordre de la “maya”. Si cette enquête sur soi-même révèle la possibilité d’une action ex­térieure, autant en user, bien sûr ; mais là n’est pas l’essentiel de l’investigation ouverte par Alan Watts.

Affronté à l’angoisse, prisonnier des pressions sociales, piégé par l’imaginaire, l’homme d’aujourd’hui aime à se revêtir d’une sagesse exotique : cette suprême élégance lui fournit un moyen de critiquer à bon compte sa propre culture tout en évitant de se remettre lui-même en question.

Que le monde moderne se veuille moderne, rien que de très normal ; que l’approche de la tradition s’effectue elle-même dans un esprit moderniste et historique, voilà par contre qui est peu légitime et qui conduit Watts à proposer de changer l’état de son esprit plus que l’état des lieux. Peu importe alors quelle catégorie d’idées se présente à la conscience ou vers quel type de chapeaux va notre préférence esthé­tico-affective. En l’absence de ce radical changement des mentali­tés, l’Orient romantique sert seulement de décor aux états d’âmes de quelques égotistes forcenés. Et, ce genre d’attirance vers l’Orient rejoint l’élan romantique vers la nature : le vent souffle, il anime la forêt d’une symphonie de craquements et de sifflements enchan­teurs, mais il n’est jamais qu’une musique d’accompagnement à l’ode que l’ego se compose à lui-même. Se vouloir “pour” l’Orient et “contre” l’Occident n’a en fait aucun sens, du point de vue même de la pensée orientale.

 

La plupart des religions s’alimentent simultanément à la source de la nature et à celle de la Parole. En d’autres termes, elles cultivent le sens du sacré comme celui de la Loi. Du côté de la “nature”, nous pouvons ranger la dimension contemplative, féminine, mythique et bien sûr l’aspect campagnard, païen. Mircéa Eliade définit clairement cet aspect: “On pourrait dire que la structure même du Cosmos conserve vivant le souvenir de l’Être suprême céleste. Comme si les dieux avaient créé le monde de telle manière qu’il ne puisse pas ne pas refléter leur existence; car aucun monde n’est possible sans la verticalité, et cette dimension, à elle seule, évoque la transcendance.6” Du côté de la “Parole”, nous trouvons l’aspect actif, masculin, rationnel et urbain (=politique) des choses.

 

 

 

Les religions et les civilisations anciennes ont tou­jours doublé cette simultanéité d’une tension, ou d’un mouvement de pendule entre l’importance préférentielle accordée à l’une ou l’autre de ces deux sources, permettant tout un éventail de nuances selon les écoles et les interprètes. Le terme de “Tao” est égale­ment utilisé par Tchouang-tseu (Zhuang-zi) et Confucius (Kongfu-zi)... a cette nuance près que l’un y voit surtout la nature, l’autre plutôt la parole et la politique !

 

 

Dans le Bouddhisme, l’expression “Corps du Dharma” (ou “Corps du Bouddha”) est tantôt comprise comme l’ordre de la nature toute entière, tantôt comme l’ordre de la doctrine. Avec le christianisme, nous trouvons le “Corps mystique du Christ”, que l’on peut entendre au sens de Cosmos ou de communauté des croyants : ceux qui ont entendu la Parole et s’y conforment, bâtissent la Chrétienté visible d’un même élan. St. Augustin tenta même d’en faire une synthèse équilibrée par sa doctrine des deux épées, l’une combattant pour le Royaume céleste et l’autre pour le Royaume terrestre. Il serait aisé de retrouver cette bipolarité dans l’Islam et dans d’autres branches de la tradition religieuse, telles qu’elles apparurent par exemple dans l’hindouisme ou la Grèce antique. ( Sur ce plan, parole et politique sont liées dans la mesure où la politique appartient à la ville, forum du dialogue et du raisonnement ; nature et religions s’y opposent parce-que la quête du divin s’accomplit dans le silence et la solitude.)

 

Par un remarquable tour de force, la Renaissance et l’humanisme parviennent à bloquer définitivement le pendule du côté de la pa­role et de la loi politique. L’apparition d’un Dieu textuel et “spirituel”, séparé des animaux comme de la terre, trompe l’homme et le coupe de lui-même. L’action divine devient alors “surnaturelle”. Primitivement, la “surnature” est Dieu, un Dieu situé à la fois dans et au- dessus de la nature. Le divin n’est en rien quelque transcendance kantienne ou théosophique venant se sur-ajouter ou se superposer à la nature. Certes, en sa transcen­dance, Dieu dépasse l’ordre naturel et culturel ; mais s’Il le dé­passe, c’est donc bien qu’Il en passe par là! La transcendance mé­diévale est en fait une surabondance de présence, la plénitude de l’immanence. Relation omniprésente, Dieu n’y est pas perçu par ex­clusion ; pour prendre une image orientale, Il demeure aussi proche de sa création qu’un fil l’est du tissu. En conséquence, si l’évolution du vocabulaire nous oblige à parler de “spiritualité”, n’oublions pas que cette dernière s’accomplit en un tissage de ma­térialité, l’esprit ne pouvant s’exclure de ses objets. La seule er­reur des “matérialistes” consiste à prétendre produire un tissage dénué de tout fil...ce qui les conduit, ne se fondant sur rien, à vivre d’abstractions insipides. Bien que l’”esprit” ne soit plus divin, l’humanité continue à se vouloir située au dessus et en dehors, se­lon la nouvelle configuration d’un petit homme statistiquement moyen et mécaniquement standardisé.

 

 

 

 

 

Dès le 16ème siècle occidental, Dieu s’est définitivement retiré de la nature. Il ne s’incarne plus dans nos viscères et dans ce qui, en les nourrissant, nous permet d’exister, mais exclusivement dans les textes. Dès lors, il devient quasi-impossible de dénicher un mystique n’ayant pas eu maille à partir avec les autorités ecclésiastiques. société et nature se désacralisent tandis que le texte, lui, se sacralise. La hantise contemporaine de l’alphabétisation et de la culture livresque en général pourrait bien être l’écho lointain de cette sacralisation suggérant que seul le texte est source de sa­voir, de pouvoir et de sagesse. L’esprit de Dieu ne passe plus par le sang du sacrifice ou le souffle de vie, mais seulement par le canal des lignes de la parole textuelle du dogme. La plupart des différences dogmatiques, qui deviennent autant de points de frictions ou de conflits, proviennent des intégrismes et fondamentalismes consistant à commettre la double erreur de prendre la doctrine au pied de la lettre et de la comprendre dans un sens tronqué, un peu à la manière d’un professeur qui enseignerait à ses élèves que La Méthode est un célèbre discours prononcé par René Descartes7

 

Notre moderne audio-visuel, voire notre sublime informatique, ne sont que l’expression d’une théolo­gie logomachique. Le rêve de pouvoir un jour imprimer la pensée humaine à une machine capable de défier la mort, pour peu qu’elle bénéficie des services d’un bon robot-mécano, exprime bien ce re­fus de l’incarnation et notre fantasme d’une perfection rationa­liste. L’âme devenue pure abstraction existerait alors en dehors des lois naturelles de la vie, cette vie par essence corruptible et mortelle, esclave du temps et assoiffée d’éternité. La volonté mo­derne de puissance illimitée fera-t-elle des contes dits de “science-fiction” une réalité ? ces histoires imaginent souvent l’homme parvenu à un tel degré de robotisation qu’il donne par mé­garde la vie à une machine, jouant une nouvelle genèse : “L’homme créa le robot à son image et ressemblance...” Lequel pauvre robot fini par se retrouver désemparé et seul dans l’univers puisqu’en le créant, l’homme ne pouvait que se détruire lui-même, à la manière dont Dieu se meurt de notre expansion humaine, en guerre contre le reste de la Création -dont nous sommes pourtant supposé faire partie.

L’homme qui a créé la machine, finit par devenir la créature de celle-ci de même qu’une certaine “création intellectuelle” du divin en a fait notre créature. On en peut que se rappeler la si célèbre phrase de Voltaire : “Dieu a créé l’homme ; mais l’homme le lui a bien rendu!”.

 

L’humanisme réduit l’identité de l’homme à un “je” penseur et rai­sonnable dont sont rapidement exclus Dieu, la nature, l’Oriental, le fou, le corps, la femme, l’enfant et la mort - tous dépourvus de raison.On s’empresse donc de les enfermer : Dieu dans le tabernacle de nos églises, la nature dans la géométrie militaire de nos jar­dins, l’Oriental dans le passé ou les rêves impossibles, le fou à l’asile, le corps dans un appareil bureaucratique destiné à surveil­ler ses hygiènes et dérèglements, la femme dans la poésie ou la servilité (laquelle finit par engendrer une révolte d’allure mascu­line), l’enfant à l’école et la mort au cimetière des regrets. Laissons cela.

Remarquons cependant que l’humanisme n’est aucunement surgi et ne s’est pas imposé du jour au lendemain. Le décalage existant entre le jaillissement d’une idée, sa prise en compte, sa récupération par les élites dirigeantes et sa diffusion à l’ensemble du corps social peut en effet être considérable. J’entends souligner par là un point qu’Alan Watts se contente de sous-entendre : la “Culture”, l’”Instruction” que nos maîtres laïcs nous font ingurgi­ter sur les bancs de l’école ne fut jamais, de la fin du 12ème siècle à ces cinquante dernières années, que le fait des châteaux ou des cénacles urbains. Internet n’existait pas encore.

La quasi totalité des populations occidentales vivaient en d’autres terres que celles de ces joutes philosophiques, esthétiques et scientifiques. Elles existaient au rythme des sai­sons, se nourrissaient de leurs contes et de transmissions orales plongeant bien des siècles en arrière, dans l’intemporalité de la tradition. Psychologiquement, elles étaient donc très proches de l’Orient. Le clergé français pouvait hier encore se plaindre des ten­dances animistes ou magiques d’un grand nombre de ses ouailles. Nos campagnes possédaient leurs sorciers et leurs “fous de Dieu”, leurs “shamans”. Quel dialogue intellectuel rapprochera jamais l’Orient et l’Occident comme pouvait le faire la similitude primor­diale d’une vie vécue dans l’ordre de la nature et non exclusivement dans celui de la cité ? Aucun... Telle est la raison qui amena Watts à cautionner sans hésitation le “laisse tomber” (“drop out”) de la contre-cul­ture américaine, la fuite individuelle hors des murs de la ville et le retour sur soi.

Chacun de ses livres vise à renvoyer le lecteur à lui-même, à réveiller en lui l’intuition poétique, la sensation d’une présence au monde concret et écologique, sans oublier le plaisir de vivre. Toutes choses qui constituent les fondement de la vie spiri­tuelle : notre corps et notre inconscient conservent le sens de la merci de Dieu, de la magie du feu, de l’eau, de l’air, du bois et de la terre. En l’absence d’une certaine joie de vivre et d’une jouissance directe et charnelle du monde, comment parvenir au stade plus subtil de la re­cherche spirituelle proprement dite ? Voilà bien l’une des questions que pose Watts en soulignant l’exigence essentielle de commencer par exister sur un plan plus “grossier” avant de s’interroger sur l’identité réelle du sujet que l’on croit être.

Le vie n’est pas un fil continu se dévidant de A à Z et l’existence humaine consiste en une perpétuelle alternance de naissances et de morts. A chaque seconde, “je” nais et meurs.

Bien que la grammaire occidentale soit centrée autour d’un sujet, l’identité réelle de ce dernier demeure inqualifiable, aussi mystérieuse que dans l’assertion : “il pleut”. Mais qui pleut donc ? Finalement, ne pourrait-on dire “ça homme”, au même titre que les anglophones disent “ça pleut” ? Ce “je” est-il bien l’agent créateur de mon être. La pluie se passe de “plu-eur”. Et pourtant, “elle” pleut. Elle ne jaillit pas “ex nihilo” mais est le produit d’un ensemble complexe de relations existant entre le sol, l’humidité, la chaleur, la configuration géologique et géogra­phique, le vent, la composition chimique de l’air et de l’eau...Et lorsque’”elle” pleut, elle mouille! Le fait de nier l’existence d’une entité séparée nommée “pluie” ne la renvoie pas pour autant au néant ni ne la supprime dans ses manifestations.

La démarche privilégiée par Watts consiste en une prise de cons­cience du fait d’être en relation. Il s’agit de percevoir que les limites et les séparations sont en fait des liaisons, des jonctions et des ouvertures. “Bien qu’il subsiste en Occident une tradition contemplative dans l’Église catholique, la vie de ‘contemplation assise’ a perdu de son attrait car aucune religion n’est reconnue valable si elle ne concourt à faire ‘progresser le monde’, et il est difficile d’admettre qu’il puisse progresser en restant immobile. (...) Il n’y a en vérité absolument rien de contraire à la nature de rester assis tranquillement pendant des heures. Les peuples dits primitifs, les Indiens d’Amérique, et les paysans de tous pays s’y adonnent, tout comme les chats, les chiens et autres animaux encore plus nerveux. (...) (Dans le za-zen) Il s’agit simplement d’une prise de conscience paisible, sans commentaire, de ce qui se passe à l’entour. Cette prise de conscience s’accompagne d’une sensation très vive de ‘non-différence’ entre le soi et le monde extérieur, entre l’esprit et son contenu, les bruits, les objets et autres manifestations du monde ambiant.8

 

A l’issue de cette démarche nous attend une dé­couverte : nous ne sommes pas seulement un réseau de relations mais la relation toute entière. Nous sommes “Cela”, dans son in­tégralité. Cette découverte intime provoque à son tour ce que l’on nomme “l’abandon” ou la reddition du vouloir, bien que le fait de s’en remettre à la grande Énergie de l’univers manifesté (Dieu, la Shakti, le Tao, ou tout simplement la Vie) ne soit aucunement synonyme de nivellement. Le “je” ayant renoncé à se prétendre séparé, les inhibitions produites par l’éducation, les contraintes et les pe­santeurs sociologiques, tombent et laissent ainsi le champ libre à l’expression totale de soi. Ne s’évertuant plus à afficher le meil­leur masque ou à porter le meilleur “chapeau”, l’être devenu inté­rieurement libre peut alors présenter sans peur la forme incarnée dans laquelle Dieu a jugé bon de le placer. Pour sa part, Watts n’hésite pas à confier qu’il n’a jamais “connu un seul mystique qui ne soit pas un individu unique et intéressant, alors que le véritable égoïste, celui qui est persuadé et convaincu de sa propre réalité bien séparée (l’a) toujours profondément ennuyé.9

Néant, vide, neutralité, fondent paradoxalement l’être, le relief et l’éclat d’une vie humaine.

 

Chaque livre de Watts se dirige vers ce centre ainsi que les rayons d’une roue convergent tous vers le moyeu à partir de différents points de la jante. Toute son œuvre dénonce joyeusement l’illusion d’un ego conventionnel, illusion que renforce la culture moderne contrairement aux sociétés anciennes qui travaillaient à l’affaiblir. Peu de lecteurs échappent au charme de la lecture et aux sourires, voire au rire, que sait produire le style de Watts. Mais sous son apparente facilité, le message de cet auteur demeure fort secret. Il ne suffit pas d’apprécier les résonances qu’il pro­voque en nous pour s’en pénétrer jusqu’au bout. Cette merveilleuse libéra­tion est en effet à l’image du sommeil : je ne puis l’obtenir qu’en osant y renoncer. L’insomnie ne provient-elle pas fréquemment d’une attitude arrogante ? “Je veux dormir” est une pétition d’une totale inanité. Il en va de même pour “je veux la libération”. Si le “je” peut toujours -et il ne s’en prive pas- lutter contre le som­meil ou la libération, comment pourrait-il combattre pour gagner l’abandon, cette abdication de lui-même que représente la plongée dans le repos...ou dans la transcendance ? S’agirait-il donc d’obtenir en renonçant ? Oui! Encore faut-il renoncer vraiment, sans au­cune espérance de vouloir renoncer. L’abandon réel de soi ne peut qu’être le fruit d’un complet désespoir, le sujet ayant constaté, au terme de bien des tentatives, son irrémédiable impuissance (en tant que soi identifié à l’ego).

 

Que reste-t-il alors ? A travers l’urbanisation et l’omniprésence des techniques de communication et de propagande, l’humanisme détruit définitivement les anciennes certitudes ; quant aux parti­sans d’un renouveau spirituel ou de l’écologie, ils raisonnent bien souvent, malgré eux, en termes politiques.

Si vouloir progresser est déjà une erreur, si je ne puis compter sur les intentions d’Occident ou d’Orient, si notre planète n’est plus qu’un vaste effi­lochage... Que me reste-t-il donc ?

 

Il reste que je puis continuer d’espérer dans le fil.

 

Le tissu de l’univers peut disparaître ; le fil, lui, subsistera et pourra, tôt ou tard, se tisser de nouveau, qu’il s’agisse de l’humanité ou de ma seule existence.

Sans me sentir qualifié pour le faire (il se pourrait en effet qu’elles constituent un “koan zen”), je voudrais citer les deux der­nières phrases de l’autobiographie d’Alan Watts : “Quand vous dites que la musique est abominable, écoutez donc plutôt le son de votre plainte. Par dessus tout, écoutez, et (pendant ce temps) je demeu­rerai silencieux.10

 

PS (2000)- Le silence n’a pas d’écho.

 

 

 

1- Cet essai est une version “revue et corrigée” de celle qui parut dans la revue Filigrane, de Juin 1986.

2- Watts disait qu'il y a trois grandes représentations de Dieu : le "dieu" personnel des monothéismes, le "dieu" comédien de l’Hindouisme aux multiples "avatars" et le "dieu" totalement impersonnel de la Chine : le Tao. Il y aurait certes quelques nuances "locales" à apporter, mais il semble hélas certain que les querelles fondamentalistes, les guerres de religion (en Orient comme en Occident, dans les temps anciens comme ceux d'aujourd'hui) se produisent chaque fois qu'on en vient à se sentir "personnellement" concerné quand un autre dit quelque chose de "mal" de "mon dieu à moi"... au sujet du "nom" que "je" donne à "mon" Dieu. On dit pourtant que sur les routes de la Grèce antique, il y avait des autels dédiés au "Dieu sans nom", afin que chaque voyageur puisse célébrer son culte, le culte de son propre "nom" sans risque d'une quelconque profanation ou attaque à l'égard du "nom" ou de la forme que les autres lui associent.

3- Mémoires, par Alan Watts, Ed. Fayard, p 371

4- Mémoires acides, par Timothy Leary, Robert Laffont, p 350

5- Mémoires, op. cit., p 367

6- Le sacré et le profane, Gallimard/Idées, 1965, p 151

7- Et, en l’occurrence, il est exact que Descartes présenta sa "Méthode" à la Nonciature apostolique de Paris, invité par le Cardinal de Bérulle. "Fondamentaliste ment", il semblerait donc que la pensée cartésienne soit indissociable d'une Nonciature. Prenons garde à ne pas blasphémer ce saint lieu !

8- Bouddhisme zen, p 172-173

9- ibid. p 293

10- ibid. p 405

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